Raconter, se raconter : ma pratique de coach et de formatrice est traversée par la communication narrative et l’attention au langage.
Mon credo : vous aider à créer l’étincelle, à déployer votre espace d’expression.

J’ai à coeur d’accompagner les personnes et les équipes vers un mieux être.
Pour qu’au fil des projets, des difficultés, des changements, elles identifient leurs ressources, trouvent leurs solutions et épanouissent leurs talents.

Anne Le Cornec, fondatrice et directrice de la société de coaching et de formation ALC COM

Interview Anne Le Cornec : “Le coach est une sorte de Candide, mais avec pas mal de bagage”

Une attention aux mots, aux silences, une certaine façon de poser les questions. Le coaching proposé par ALC COM est un espace de conversation. Où il s’agit d’écouter comment le langage (nous) travaille, enferme parfois dans des représentations stéréotypées. Se raconter autrement, faire de nouveaux liens, retrouver de l’envie, de l’énergie : le coaching est un cheminement libératoire. “Quand on nomme les choses, on sent déjà comme un déplacement”, explique Anne Le Cornec. Entretien.

Fondatrice et animatrice de la société de coaching et de formation ALC COM, Anne Le Cornec est une spécialiste de la communication en entreprise. Coach certifiée, diplômée en lettres modernes et en sciences de l’information et de la communication, ancienne journaliste, elle a piloté des communautés éditoriales dans le monde industriel. Elle a ainsi créé et déployé un dispositif de communication pour aider un réseau européen de 1 500 chercheurs à valoriser leurs travaux et compétences. Une expertise et une technicité qui alimentent son approche du coaching : éclairer une situation personnelle sous différents angles, créer des passerelles, ouvrir des perspectives, trouver une autre manière de raconter. De se raconter.

Des coachs, on en trouve pour toutes sortes de domaines. Qu’est-ce qui fait que l’on fera appel à un coach dans l’univers professionnel ?

Anne Le Cornec : Le plus souvent, c’est au moment où on rencontre une difficulté professionnelle, quand on envisage une inflexion dans sa carrière ou que l’on souhaite renforcer une compétence particulière. Le coaching agit alors comme une sorte de révélateur. Dans mon approche, il consiste à accompagner une personne, pour lui permettre de trouver en elle-même ses propres solutions.

Comment cet accompagnement se déroule-t-il ?

A. L. C. : Nous accomplissons ensemble un bout de chemin. Si le cœur nous en dit, ce peut être d’ailleurs au sens littéral du terme : converser tout en marchant ! Dans leur dialogue “Je marche donc je pense” (Albin Michel, 2022), le philosophe Roger Pol-Droit et le neurologue Yves Agid valorisent les rapports entre pensée, parole et marche. Pour le coaching, nous nous installons le plus souvent pour des séances calibrées à 90 minutes. La toute première, sans frais, est une prise de contact. Ce qu’on appelle le feeling est essentiel dans le travail que nous avons à faire ensemble. Une fois cette confiance établie — ce qu’en coaching nous appelons une alliance —, nous pouvons engager une conversation, à bâtons rompus mais dans une démarche méthodique.

Affronter un moment-clé ou critique dans une vie professionnelle : le coaching ne concerne-t-il que les individus, ou aussi les groupes ?

A. L. C. : Les deux. Je pratique du coaching individuel comme d’équipe. Quand les enjeux sont collectifs, il peut s’agir de faire face au conflit, de favoriser le “Pouvoir de la confrontation positive”, au sens où l’entendait Barbara Pachter (Marabout, 2016). Comment retrouver du “commun” ? Comment renforcer l’esprit de cohésion ? Le travail de coaching collectif consiste le plus souvent, au cours d’ateliers que nous animons à deux, à identifier un ou plusieurs problèmes qui se posent au groupe et à les externaliser, de manière à mieux les affronter. Ce que Pierre Blanc-Sahnoun, membre fondateur de l’Association européenne de coaching (EMCC), appelle “Rétrécir le dragon sans se brûler les sourcils” (InterÉditions, 2023). Regarder les problèmes de l’extérieur, sous un autre angle, en faisant un pas de côté, est bien souvent ce qui permet de faire émerger les idées… et les solutions !

Vous évoquiez la philosophie à l’instant. Souvenez-vous de la réplique de Fabrice Luchini, qui joue un maire en panne d’inspiration dans le film “Alice et le maire” (2019) : “Je préfère recourir à la tradition philosophique plutôt qu’à un coach.” Pourquoi préférer un coach ?

A. L. C. : Il me semble que les enjeux sont différents. Tel que je le conçois, mon rôle de coach ne consiste pas à prodiguer des conseils ou à plaquer des recettes qui viennent de l’extérieur. Mon postulat, c’est que la personne coachée a toutes les ressources en elle. Elle saura juger ce qui est bien pour elle. Aucun coaching ne peut fonctionner sans cette démarche volontariste. Au cours de la première séance, nous travaillons à clarifier et au besoin à reformuler sa demande. Mon travail est d’être pour cette personne un miroir et un catalyseur de sa parole. Je lui renvoie des mots, des formulations que j’ai captés lors de nos échanges. Elle prend conscience que les situations comptent parfois moins que le regard que nous portons sur elles.

Mais les blocages dans l’entreprise ne sont pas tous liés à des façons de regarder ou de raconter les choses ?

A. L. C. : Certes. Je sais d’expérience, pour avoir travaillé dans un grand groupe industriel, que les questions organisationnelles peuvent plus ou moins laisser respirer le sens de l’initiative. Mais je sais aussi que nous avons souvent plus de marge de manœuvre que nous ne voulons bien le dire, plus de choix qu’on ne peut le penser. Le pas n’est pas toujours facile à franchir, ce qui rend pertinente l’intervention d’un coach. Son écoute attentive et sensible se double d’une intention : aider une personne à se reconnecter à ce qu’il y a de mieux en elle, à ce qui lui permet d’être en accord avec elle-même, ce qui lui donne le plus de force professionnelle.

Quel serait le meilleur indice d’un coaching réussi ?

A. L. C. : Peut-être une exclamation comme “Ah ! Mais je n’avais jamais vu les choses comme ça !” On peut alors sentir une compréhension nouvelle, par là-même une forme de libération. Quelque chose bouge grâce aux mots, des perspectives s’ouvrent. C’est le cas par exemple avec quelqu’un qui aurait tendance à la procrastination. Grâce au coaching, je l’amène à mettre ce trait de caractère à distance, à en faire un phénomène extérieur pour mieux le circonscrire, le décortiquer, le surmonter ou le transformer.

Nous sommes quelque part entre un questionnement à la Socrate et l’innocence de Candide ?

A. L. C. : Je crois que le coach est une sorte de Candide, mais avec pas mal de bagage, de la méthode. Un cycle de coaching comprend entre 6 et 10 séances. Il repose sur un processus précis. C’est ce travail méthodique qui permet de sortir du vague d’une demande, par exemple “reprendre confiance en soi”. Nous fixons des objectifs et des indicateurs, ainsi que le nombre de séances qui nous semble adapté. C’est le coaché qui décidera dans notre cheminement le moment où il pense avoir atteint ses objectifs. Ainsi bordées, les séances sont un espace où la personne peut prendre la parole. La prendre, dans toute la force de l’acception.

S’il est un Candide outillé, le coach a aussi une responsabilité particulière. Avec le coaching, on touche à une matière sensible…

A. L. C. : C’est un point fondamental. Quand on choisit un coach, il faut s’assurer de son éthique personnelle. Difficile d’imaginer un bon professionnel qui n’ait un superviseur dans son activité de coaching, un groupe de pairs sur lequel s’appuyer pour l’aider à analyser ses pratiques, à formuler des hypothèses. Encore une fois, il ne s’agit pas pour le coach de tirer des conclusions à la place de la personne coachée, mais de l’aider à trouver son impulsion vers ses solutions à elle. Le tout-pouvoir du coach est une illusion et un danger.

Supervision, groupes de réflexion et recul sur l’activité de coaching : n’est-ce pas le sens de votre engagement aux côtés d’Initiales Réseau Pluridis, l’organisme qui vous a par ailleurs formée ?

A. L. C. : Absolument. Le recul et le travail entre pairs au sein d’une communauté professionnelle est le minimum qu’on puisse attendre d’un coach. Gageons que ce soit partout ailleurs le cas… Mais je me reconnais surtout pleinement dans la manière dont Initiales Réseau Pluridis envisage la raison d’être du coach : aider ceux que nous accompagnons à déployer leur espace. Il s’agit de chercher à créer avec les personnes coachées des espaces-temps de réflexion, de ressourcement et de respiration, afin d’explorer et de “déplier” les situations professionnelles qu’elles vivent. La finalité est de retrouver des marges, des possibilités d’action.

Avec sans doute votre touche supplémentaire, une expertise dans la communication et les pratiques narratives ?

A. L. C. : C’est en effet ma formation, mon expérience et ma conviction. La narration a un pouvoir de réalisation. En se dégageant de certains récits — qui nous sont parfois imposés par notre environnement — desquels nous pouvons être prisonniers, nous nous donnons les moyens de faire émerger une autre histoire. De tisser de nouvelles histoires, de nous réécrire en quelque sorte. Vous parliez un peu plus tôt de matière sensible : elle l’est aussi au sens où avec le travail sur les mots quelque chose de nouveau s’imprime. On retrouve alors des comportements alignés avec ce que nous voulons être ou faire, avec ce qui est précieux pour nous.

Propos recueillis par Stéphane de Torquat